Les compagnies aériennes semblent avoir retrouvé le sourire. A l’occasion de ses journées média, l’association internationale du transport aérien (IATA) a fait preuve d’un optimisme qui s’inscrit dans la continuité de la tendance à la reprise cet été. La demande est revenue et l’équilibre offre-demande s’est rétabli, certaines compagnies ont vu leur activité redevenir bénéficiaire ces derniers mois… Alors même si le secteur devrait encore enregistrer 6,9 milliards de dollars de pertes en 2022, l’optimisme est au goût du jour, porté par la prévision d’un bénéfice global de 4,7 milliards de dollars en 2023.
« Partir de près de 140 milliards de dollars de pertes en 2020 pour arriver à moins de 7 milliards de pertes cette année est une performance absolument phénoménale. Les précédentes crises étaient d’une magnitude d’à peine quelques pourcents en termes de perte de trafic par rapport à ce que nous avons vécu en 2020 et le temps de reprise était de deux à trois ans. Là, en quatre ans, nous serons capables de dégager à nouveau des bénéfices », souligne Marie Owens Thomsen, chief economist de l’IATA.
On constate ainsi que l’IATA a relevé ses prévisions par rapport à cet été, lorsqu’elle tablait sur une perte de 9,7 milliards de dollars pour 2022. L’association estime en effet que les yields de ses compagnies membres vont augmenter de 8,4 % et non 5,6 %, portés par la forte demande des passagers, tandis que le cargo est resté un secteur refuge. Le chiffre d’affaires de l’industrie devrait ainsi atteindre 727 milliards de dollars, en hausse de 43,6 % par rapport à 2021.
Les compagnies globalement rentables en 2023
Le taux élevé d’emploi et le maintien de la demande des passagers (qui devrait retrouver 85,5 % de son niveau de 2019 en 2023) face à la réouverture quasiment générale des frontières (à l’exception notable de la Chine) laissent l’IATA penser que ses compagnies seront généralement bénéficiaires en 2023. A noter que ce sera le cas dès 2022 pour les compagnies d’Amérique du Nord. Il faudra toutefois attendre 2024 selon elle pour retrouver le niveau de 2019 en termes de nombre de passagers.
L’un des arguments qui nourrit l’optimisme de l’IATA est que les compagnies ont considérablement assaini leur structure de coûts durant la crise et se sont dotées d’une flexibilité qu’elles n’avaient pas forcément et qui devrait les aider à faire face aux menaces à venir. Et elles ne manquent pas : augmentation des coûts du carburant (avec toutefois une légère baisse attendue en 2023 par rapport à 2022, de 138,8 à 111,9 dollars le baril de Jet-A, malgré les difficultés de raffinage), augmentation des coûts de personnel, inflation, fermeture de l’espace aérien russe aux compagnies européennes, politique de la Chine, augmentation des charges aéroportuaires et de contrôle aérien, taxes environnementales… Alors que la croissance du PIB mondial ralentit, la récession pourrait guetter certaines économies, même si l’IATA ne croit pas à une récession générale.
« Le travail de gestion des compagnies aériennes va rester difficile et la surveillance constante des incertitudes économiques va être critique », prévient Willie Walsh, le directeur général de l’association. Car s’il y a une chose qui n’a pas changé avec la crise, c’est la faiblesse des marges des compagnies aériennes, qui rend la reprise très fragile. Or deux nouveaux sujets d’inquiétude se profilent : l’embargo sur le pétrole russe et celui à venir sur les produits raffinés (en février) pourraient faire repartir à la hausse le prix du kérosène. De même, l’IATA table sur une réouverture progressive de la Chine en 2023 qui risque d’introduire une distorsion de concurrence sur les liaisons entre l’Europe et l’Asie, les compagnies chinoises pouvant survoler le territoire russe mais pas les compagnies européennes.
« Les défis à relever en 2023, bien que complexes, relèveront de nos domaines d’expérience. Le secteur a acquis une grande capacité d’adaptation aux fluctuations de l’économie, aux principaux facteurs de coût tels que le prix du carburant et aux préférences des passagers. Il est encourageant de constater qu’il y a beaucoup d’emplois et que la majorité des gens ont envie de voyager, même si les perspectives économiques sont incertaines. »