Les représentants du secteur aérien en France s’alarmaient depuis l’été de la possibilité de création par le gouvernement d’une nouvelle taxe qui pourrait peser sur le transport aérien. Malgré les alertes envoyées depuis la rentrée, le gouvernement a introduit dans son projet de loi de finances pour 2024 une taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport longue distance, en tête desquelles les aéroports.
« Afin de contribuer au financement du ‘plan d’avenir pour les transports’ consistant en des investissements dans les infrastructures favorisant la réduction de l’impact des mobilités sur l’environnement, le PLF 2024 institue une taxe sur les grandes exploitations d’infrastructures de transport de longue distance. Le rendement annuel attendu est de 600 millions d’euros, répartis essentiellement entre les grandes concessions autoroutières et les grands aérodromes », peut-on lire dans le projet de loi.
L’Union des aéroports français (UAF) explique que cette taxe concernera les aéroports dont le chiffre d’affaires annuel (hors sécurité et sûreté aéroportuaires) dépasse 120 millions d’euros et dont la marge dépasse les 10 %. Elle touchera donc les aéroports du groupe ADP et les aéroports de Nice, Marseille et Lyon. Un taux de 4,6 % sera retenu sur la partie du chiffre d’affaires supérieure à la franchise de 120 millions d’euros.
L’UAF dénonce un fardeau supplémentaire sur les aéroports alors qu’ils sont déjà sortis très affaiblis de la crise et doivent réaliser de lourds investissements dans leurs infrastructures et en faveur de la décarbonation de leurs activités. Les représentants des compagnies aériennes (IATA, FNAM et SCARA) préviennent que c’est sur elles que cette nouvelle taxe va peser, le groupe ADP ayant déjà indiqué qu’il prévoyait de répercuter une partie de l’augmentation des charges dans les tarifs de redevance.
« Absurde et préjudiciable » selon l’IATA, cette taxe est une nouvelle menace sur la compétitivité du pavillon français, déjà faible, et sur la capacité des compagnies aériennes à investir dans leur décarbonation. La FNAM rappelle que le contexte fiscal actuel fait déjà perdre depuis des années un point de part de marché par an au pavillon français, au profit d’opérateurs bénéficiant d’un environnement réglementaire et fiscal plus favorable dans leurs pays d’origine.
Elle est d’autant moins justifiée à ses yeux que les recettes seront affectées à d’autres modes de transport – notamment au ferroviaire, priorité affichée du projet de loi dans le domaine des transports. Pour la FNAM, le secteur n’a pas besoin d’une nouvelle taxe mais « d’un cadre fiscal stable permettant aux compagnies aériennes basées en France de concrétiser leurs investissements dans de nouvelles flottes et d’acquérir dans les quantités suffisantes les carburants aéronautiques durables nécessaires à la décarbonation. »
« Il s’agit d’une ponction de 150 millions d’euros sur les efforts déployés pour rendre l’économie française plus compétitive. Le parlement français devrait rejeter ces propositions et se concentrer sur des solutions environnementales telles que les carburants aéronautiques durables et un contrôle du trafic aérien plus efficace, tout en encourageant la connectivité longue distance dans le pays », estime l’IATA par la voix de Rafael Schvartzman, son vice-président régional pour l’Europe.