Souvent critiquée pour son conservatisme face à l’innovation du New Space, l’Europe travaille pourtant sur des concepts comme le moteur à bas coût réutilisable Prometheus. Lancé fin 2017 dans le cadre du Future Launchers Preparatory Programme (FLPP) de l’ESA, le développement d’un démonstrateur va s’accélérer avec la conception et la fabrication de deux turbines à l’échelle 1:1. Un contrat a été signé en ce sens entre ArianeGroup et GKN Aerospace le 4 septembre.
A ce titre, l’équipementier britannique doit livrer une première turbine fin 2019. Le travail se déroulera dans son centre d’excellence de Trollhättan, en Suède, avec l’aide de plusieurs partenaires. Sa conception s’appuiera fortement sur les capacités offertes par la fabrication additive (impression 3D).
L’objectif est double. Sur le plan technologique, cela permettra à GKN de proposer un design inédit à même de répondre à de très fortes contraintes de chaleur, vitesse et pression et ainsi accroître les performances du futur moteur.
Baisse de coûts
Sur le plan industriel, la fabrication additive se montre adaptée aux petites séries, grâce notamment à une simplification de la production. Le nombre de pièces nécessaires va fortement diminuer et passera d’une centaine pour un design classique à deux. Cela devrait permettre à la turbine de gagner en robustesse – et donc faciliter sa réutilisation – et de perdre en masse, mais aussi de réduire significativement les temps de fabrication.
Cette production simplifiée devrait déboucher sur une importante baisse des coûts. GKN Aerospace estime qu’elle pourrait être de l’ordre de 90 % par rapport à une conception classique, mais ne précise pas si cette équation comprend uniquement les coûts de production ou également ceux opérationnels. Quoiqu’il en soit, l’équipementier se veut ainsi en ligne l’objectif prioritaire de Prometheus, à savoir proposer un moteur avec un coût divisé par dix, réutilisable, capable d’être produit à une cinquantaine d’exemplaires par an.
Le choix du méthane
Comme son nom l’indique – Prometheus (Precursor Reusable Oxygen METHane cost Effective propUlsion System) – le futur moteur s’appuiera sur un couple oxygène liquide et méthane. Cet ergol présente des avantages en termes de coûts, de disponibilité, de manipulation mais aussi de compatibilité avec l’oxygène avec une température de liquéfaction proche.
Destiné à équiper un premier ou un deuxième étage, le Prometheus pourra produire une poussée variable allant jusqu’à 1 000 kN, être rallumable et réutilisable jusqu’à cinq fois. Le premier essai d’un démonstrateur complet à échelle 1:1 est prévu en 2020.
Vers un lanceur européen réutilisable
L’objectif est d’arriver à un moteur opérationnel à l’horizon 2030, pour la génération de lanceurs européens qui succèderont à Ariane 6 et Vega-C. Son développement doit notamment ouvrir la voie à la conception d’un lanceur réutilisable sur le marché mondial afin de renforcer la compétitivité du Vieux Continent.
D’autres projets de moteurs sont menés au sein du FLPP, comme l’ETID (Expander-cycle Technology Integrated Demonstrator). Mis à feu pour la première fois en juin dernier, il doit aboutir à un moteur d’étage supérieur de lanceur pour la classe des 10 tonnes de poussée à l’horizon 2025.