Le 15e tir de Vega (VV15) s’est apparenté à un long chemin de croix. Après plusieurs reports pour des causes météorologiques, le lanceur européen a fini par connaître une défaillance peu après son décollage, qui a conduit à l’échec de la mission dans la nuit du 10 au 11 juillet. Arianespace, en charge de ce lancement, a indiqué qu’une commission d’enquête indépendante allait être rapidement mise en place pour déterminer les causes de l’accident. La charge utile, le satellite de reconnaissance militaire émirien FalconEye1, a été perdue.
Le lancement VV15 était initialement prévu pour le 5 juillet depuis le Centre spatial guyanais (CSG) de Kourou. En raison de vents défavorables trop importants, le tir a donc été repoussé à plusieurs reprises jusqu’au 11 juillet à 1h53 UTC. Les premiers instants du décollage ne laissaient pourtant pas entrevoir l’échec à venir, avec une propulsion du moteur P80 et une trajectoire nominales. La situation s’est dégradée peu après la séparation du premier étage et la mise en route du moteur Zefiro 23, au bout de deux minutes de vol environ. Une trentaine de seconde plus tard, malgré une poussée toujours annoncée comme nominale par la directrice des opérations (DDO), Vega a commencé à s’écarter de la trajectoire prévue. Il se trouvait alors à 68 km d’altitude, évoluait à une vitesse de 2,09 km/s et avait déjà parcouru 143 km.
Une trentaine de secondes plus tard, le lanceur était toujours à 79 km d’altitude, plusieurs kilomètres sous le plan de vol prévu. La DDO a alors déclaré que la trajectoire n’était pas normale, puis dégradée. La séparation du deuxième étage et l’allumage du moteur Zefiro 9, se sont tout de même déroulés au moment prévu, respectivement à 3 minutes 38 secondes et 3 minutes 51 secondes, bientôt suivis par le largage de la coiffe. Mais rapidement la DDO a annoncé une perte de l’accélération et une trajectoire très dégradée, puis retombante. Après environ 5 minutes 40 secondes de vol, la communication avec le lanceur et la télémesure ont été perdues. La DDO s’est alors résolue à annoncer un « accident lanceur ».
Les excuses d’Arianespace
Moins de dix minutes après le lancement, Luce Fabreguettes, directrice exécutive d’Arianespace en charge des Missions, des Opérations et des Achats d’Arianespace, a pris brièvement la parole : « Environ deux minutes après le décollage, autour de la mise à feu du moteur Zerofire 23, une anomalie majeure s’est produite, aboutissant à la perte de la mission. Au nom d’Arianespace, je souhaite présenter nos plus profondes excuses à nos clients pour la perte de leur chargement. […] A partir des premières analyses des données de vol, nous allons obtenir plus d’informations précises dans les heures qui viennent et nous allons les communiquer à tout le monde au plus vite ».
Elle a été rejointe par Jean-Yves Le Gall, président du CNES, par voie de communiqué : « Cet échec de Vega nous rappelle une fois encore que nous faisons un métier difficile, où la frontière entre le succès et l’échec est extrêmement ténue. Il est d’autant plus inattendu qu’il intervient après 14 succès qui avaient démontré la maturité de ce système de lancement. Nos équipes vont immédiatement se remettre au travail pour analyser, comprendre et corriger les causes de cette défaillance afin que nous puissions repartir en vol dans les meilleurs délais. »
Premier échec pour Vega
Il s’agit donc du premier échec du lanceur Vega en quinze lancements. Il est produit sous la maîtrise d’oeuvre de l’industriel italien Avio pour le compte de l’Agence spatiale européenne (ESA) et est exploité exclusivement par Arianespace depuis le CSG. Il a été développé dans les années 2000 et mis en service il y a sept ans avec un vol de qualification en février 2012. Ce lanceur léger est composé de trois étages : le premier est motorisé par un P80, le deuxième par un Zerofire 23 et le troisième par Zerofire 9, tous produits par Avio. Il est conçu pour emmener des charges allant de 2,3 tonnes en orbite basse (450 km) jusqu’à 1,5 tonnes en orbite polaire (700 km). Il doit être remplacé par Vega-C, dont le premier tir est prévu pour la fin de cette année.
La mission VV15 devait placer FalconEye1, d’une masse de 1 197 kg au décollage, sur une orbite héliosynchrone à 611 km d’altitude pour le compte des Forces armées des Émirats Arabes Unis. Ce satellite dit d’observation de la Terre – mais que l’on pourrait qualifier d’espion – a été développé sous la maîtrise d’oeuvre Airbus Defence & Space, en charge de sa conception et de son intégration, ainsi que de la fourniture de la plateforme. De son côté, Thales Alenia Space, désigné co-maître d’oeuvre, était responsable la charge utile, composé d’un instrument optique à très haute résolution et du sous-système de transmission des images, ainsi que de la chaîne image au sol et de la co-ingénierie du système global. Son « sister-ship », FalconEye2, doit aussi être lancé sur Vega un peu plus tard cette année.
FalconEye1 lors de son encapsulation dans la coiffe de Vega (VV15). © Arianespace