Dans un contexte difficile pour le transport aérien français, Air Caraïbes continue de tirer son épingle du jeu grâce à une gestion attentive et rigoureuse qui lui permet d’être bénéficiaire tous les ans. L’autre conséquence de cette philosophie est que la compagnie se donne les moyens d’investir dans sa flotte et de mener une politique de croissance raisonnée. Et qui dit croissance dit recrutements.
Actuellement, la compagnie emploie entre 1 200 et 1 300 salariés (un écart qui s’explique par la saisonnalité de l’activité), répartis à parts égales entre personnel navigant et personnel au sol. L’introduction du premier Airbus A350-1000 en décembre – qui portera la flotte long-courrier à neuf appareils – va permettre d’augmenter les effectifs. On estime qu’un appareil introduit entraîne la création de près d’une centaine d’emplois.
Augmentation des effectifs d’ingénieurs
L’introduction des A350 a fait évoluer les besoins d’Air Caraïbes. « Nous embauchons des ingénieurs car ces avions sont connectés, avec de nouvelles capacités de transmission de données pour la maintenance », explique Yoann Paulin, directeur général délégué de la compagnie.
Le besoin est d’autant plus fort que la digitalisation se développe très vite. Tous les processus s’automatisent : l’enregistrement des passagers, l’enregistrement des bagages, « même l’embarquement va se faire sans personnels », prédit Olivier Besnard, directeur général d’Air Caraïbes. « Nous sommes dans une recherche constante de réduction des coûts et nous sommes obligés de suivre cette tendance pour rester concurrentiels », explique Yoann Paulin. « Mais cela crée d’autres types d’emplois », souligne-t-il, en poursuivant : « il y a quatorze ans, il y avait une personne sur les métiers d’ingénierie informatique, maintenant c’est une vingtaine. Et encore, nous externalisons beaucoup. »
Air Caraïbes est donc en recherche constante de profils d’ingénieurs : ingénieurs informatiques, intéressés par les nouvelles technologies, chefs de projet dans le digital et ingénieurs issus des écoles d’aéronautique pour travailler sur les domaines de la préparation du vol et de l’optimisation du carburant, qui ont recours à des outils pointus.
Des difficultés à recruter des pilotes et des mécaniciens
Au-delà de son besoin d’ingénieurs, Air Caraïbes vit la même pénurie que ses consoeurs sur le marché des pilotes. « Il n’est pas évident de trouver des PNT. Malheureusement, l’arrêt des activités de XL Airways et Aigle Azur va remettre des pilotes sur le marché donc on aura un peu moins de difficultés, mais nous étions très inquiets il y a huit mois », reconnaît Yoann Paulin.
Elle éprouve également des difficultés à trouver ses mécaniciens. Ils sont 22 en poste aujourd’hui, qualifiés sur ATR, A330 et A350. Air Caraïbes réalise en interne la maintenance en ligne des long-courriers en Guyane et en Martinique (elle est sous-traitée à iGo à Orly) et assure la maintenance en ligne et les checks A de sa flotte d’ATR.
© Air Caraïbes
Une priorité donnée aux ultra-marins
« Nous essayons d’embaucher des ultra-marins. C’est très important pour nous parce que l’emploi est difficile dans les départements d’outre-mer puisqu’il y a 20% de chômeurs. Il est important de participer au développement économique et de mettre l’accent sur l’embauche locale. »
Pour y parvenir au mieux, Air Caraïbes mise sur la formation. Elle a un partenariat dans ce domaine avec les régions Guadeloupe, Martinique et Guyane et travaille sur un projet de centre de formation aéronautique. Elle prévoit de le mettre en service dans deux ans. Il formera sur tous les métiers : de l’agent au PNC, en passant par le PNT et les mécaniciens. Son objectif est de créer des vocations et nourrir les besoins de la compagnie. Mais « s’il n’y a pas suffisamment de ressources disponibles, avec des profils formés, nous nous tournons vers la métropole. »
Un turnover beaucoup plus important à Orly que dans les Caraïbes
Le fait de pouvoir recruter aux Caraïbes donne un avantage à la compagnie : la fidélisation de son personnel. Yoann Paulin explique par exemple qu’Air Caraïbes vient de recruter une personne dotée d’un doctorat en big data dans les Antilles et que le paramètre de la localisation a facilité son embauche. « Un profil comme celui-là à Paris aurait été très difficile à capter. »
L’emploi à Paris est en effet soumis à une très forte concurrence, y compris des autres secteurs d’activité, qui rend les profils intéressants difficiles à attirer et, une fois embauchés, difficiles à conserver. Le turnover est donc assez important sur la base d’Orly, particulièrement dans la population la plus jeune et celle des ingénieurs.
Autrement, le phénomène dépend des métiers. « Au sol, aux Antilles, le personnel a envie de rester et nous avons des carrières très longues, parfois de plus de trente ans ». Cela se vérifie également auprès des PNC mais moins auprès des PNT, même si la promesse de pouvoir passer du secteur régional au secteur transatlantique est un argument de fidélisation. « Air Caraïbes est une grosse boîte à l’échelle antillaise. Quand vous entrez vous restez. »