Cela fait maintenant plusieurs semaines que le sujet agite le transport aérien : l’interdiction faite aux passagers en provenance certaines destinations du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord d’emporter leurs ordinateurs portables et tablettes en cabine sur des vols à destination des Etats-Unis. Ce PED (Portable Electronic Device) ban, décidé de façon unilatérale par l’administration de Donald Trump au mois de mars, a déjà commencé à avoir un impact sur le trafic puisque celui-ci a baissé entre le Moyen-Orient et les Etats-Unis en avril pour la première fois.
L’IATA regrette cette interdiction, que le Royaume-Uni a reprise, pour plusieurs raisons. La principale est le côté unilatéral de la décision. « Il n’y a eu aucune consultation avec l’industrie et peu de temps pour la mise en place. Cette action a pris tout le monde par surprise. Cela a été un grand défi pour les compagnies de s’adapter et un grand inconvénient pour les passagers. Cela ne devrait pas se passer ainsi », dénonce Alexandre de Juniac, le directeur général de l’organisation. Il estime par ailleurs que cette décision menace la confiance que les passagers pouvaient avoir en l’industrie. Et l’organisation s’interroge sur la sûreté de laisser des appareils dotés de batteries lithium-ion en soute…
L’IATA estime que dans son état actuel, le PED ban touche 17 000 vols et 4,8 millions de passagers par an, avec près de 200 millions de dollars de pertes : 178 millions de dollars en productivité pour les voyageurs et 20 millions de dollars aux compagnies en tâches supplémentaires de handling et en retards. Toutefois, si la menace a pour le moment été écartée pour une extension de l’interdiction à l’Europe, elle pourrait porter ce coût pour l’industrie à 160 millions de dollars par an, voire 890 millions de dollars en cas d’interdiction mondiale. Et la perte en productivité des voyageurs à plus d’un milliard de dollars pour l’extension à l’Europe et 2,5 milliards de dollars avec une application mondiale.
La principale demande de l’IATA est la communication. Si l’organisation comprend que les services de renseignements ne peuvent pas partager leurs informations, elle demande à ce que les gouvernements discutent avec l’industrie avant de prendre ce genre de décision afin de pouvoir les mettre en place de la façon la plus efficace possible et planifier une solution moins extrême. Ainsi, le PED ban pourrait être évité à court terme avec un recours accru à des systèmes de détection d’explosifs, une meilleure formation des agents de sécurité à la détection des menaces posées par les PED, un déploiement plus large des brigades canines et des officiers spécialistes du comportement… A plus long terme, il s’agirait notamment de déployer la dernière génération des scanners. Mais « la solution n’est pas unique, il faut un ensemble de mesures pour assurer une sécurité au meilleur niveau possible », souligne Nick Careen, SVP Airport, Passenger, Cargo, Security à l’IATA.
Et afin de faire passer le message auprès des gouvernements que l’industrie est prête à coopérer avec eux, l’assemblée générale de l’IATA, qui se déroule actuellement à Cancun, a adopté une résolution dans ce sens, entérinant également le soutien de l’IATA au Global Aviation Security Plan de l’OACI (GASeP). « L’aviation est une cible pour les terroristes qui veulent détruire la liberté qui est au coeur de notre activité. Le partage des informations entre les gouvernements et l’industrie est la clé pour garder une longueur d’avance sur l’émergence de nouvelles menaces. Nous avons les mêmes objectifs : garder les passagers et les équipage en sécurité. C’est donc du pur bon sens que de travailler ensemble aussi étroitement que possible », a conclu Alexandre de Juniac.