L’IATA semble de plus en plus pessimiste au fur et à mesure que passent les semaines. Dans un nouveau point d’étape de la crise liée à la pandémie de covid-19, l’association des compagnies aériennes a annoncé que le pire des scénarios qu’elle avait envisagé il y a tout juste quinze jours avait été relégué aux oubliettes. Ce ne sont plus 113 mais 252 milliards de dollars de chiffre d’affaires qui échapperont à ses membres. Par ailleurs, pour la première fois, la pandémie est couplée à une récession, ce qui retardera la reprise.
En partant du principe que les restrictions dures de vol actuellement mises en place partout dans le monde se maintiennent durant trois mois, la perte de chiffre d’affaires sera ainsi en moyenne de 38% en 2020 par rapport à 2019. Toutes les régions seront durement touchées mais c’est l’Europe qui subira le plus les effets de la crise liée au nouveau coronavirus : les compagnies du vieux continent connaîtront un manque à gagner de 46%, soit 76 milliards de dollars. Devenue l’épicentre de la pandémie, c’est en effet elle aussi qui a vu ses capacités le plus rapidement diminuer, et à la plus grande ampleur, avec une réduction de 90% au deuxième trimestre. Au niveau mondial, elles ont en moyenne chuté de 65%.
L’IATA a relevé deux différences par rapport à l’épidémie de SRAS en 2003. D’abord, la maladie s’est diffusée dans le monde entier. Et sa persistance ne permet pas aux pays qui ont réussi à l’endiguer de voir leur trafic repartir puisque le nombre de contaminations risque de repartir avec lui en raison des cas importés. C’est ce que craignent aujourd’hui la Chine, Singapour, la Corée du Sud et le Japon, où l’épidémie a été enrayée, mais où les compagnies continuent de réduire leurs capacités.
Mais surtout, cette pandémie s’est associée à une récession que personne n’attendait plus, en tout cas pas maintenant. L’IATA ne compte donc plus sur une reprise en V rapide de six mois mais plutôt une crise en U, avec une chute de la confiance des consommateurs, trois mois de d’immobilisme et une reprise progressive. D’autant que selon ses estimations, les efforts que devront consentir les gouvernements fiscalement pour stimuler la reprise devront être plus importants que ceux de la crise financière de 2008.
Ainsi, la demande des passagers devrait diminuer plus vite que les capacités. L’IATA prévoit ainsi que les coefficients de remplissage pré-crise ne soient de nouveau atteints qu’à la fin de l’année, sachant que, à cette date, les capacités pourraient être inférieures de 10% à celles de 2019. En revanche, les yields mettront plus de temps à se redresser et pourraient alors être inférieurs de 5%. Mais l’IATA prévient que « vu les dépréciations récentes, ceci pourrait être sous-estimé ».
Alexandre de Juniac, le directeur général de l’association, prévient donc de nouveau qu’une « crise de liquidités arrive à pleine vitesse » sur l’industrie du transport aérien et que celui-ci a besoin d’une aide importante (250 milliards de dollars) et urgente. « Sans aide, près de la moitié des compagnies pourraient disparaître dans les prochaines semaines », assène-t-il.